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24 août 2016 3 24 /08 /août /2016 08:56
Quand Talon charme les syndicalistes

L’occasion était trop bonne pour que Patrice Guillaume Athanase Talon ne s’en saisisse pas. La première rencontre entre les responsables de centrales syndicales et le Président de la République du Bénin depuis l’avènement du Nouveau Départ a offert à ce dernier l’opportunité d’étaler encore ses dissemblances avec l’ancien Chef de l’Etat Thomas Boni Yayi. Au grand plaisir de l’ensemble des syndicalistes. En attendant que ça ne change. Car il y a environ dix ans, tout avait commencé avec presque autant d’enthousiasme partagé. Et on sait très bien dans quelle ambiance pernicieuse tout s’est achevé.

Dix années d’une collaboration parsemée de duperies. Dix années d’une collaboration parsemée de promesses souvent non tenues. Dix années de traitement inégalitaire des partenaires sociaux. Dix années de tentatives de division. Dix années durant lesquelles la coopération a tourné à la confrontation, voire même à la répression. C’est avec ce talus d’appréhensions dans la tête que Paul Esse Iko, Pascal Todjinou, Dieudonné Lokossou, Noel Chadaré, … sont allés le lundi 22 aout dernier, plus de quatre mois après son accession au pouvoir, rencontrer enfin pour la première fois le Président Talon. Une audience qu’ils auraient aimé avoir obtenu bien plus tôt en raison de l’urgence qu’ils jugent caractériser leurs revendications corporatistes, mais aussi au regard de leur contribution de premier plan à l’avènement de la Rupture. Pour avoir déjà trop attendu, c’est donc un Président sinon ingrat sur les bords, mais au moins peu au fait des réalités des conditions de vie et de travail des Travailleurs béninois que les leaders syndicaux s’attendaient à voir au Palais de la Marina ce jour-là. Erreur !

Exit le Président de la République qui fait patienter ses visiteurs des heures avant de les recevoir (parfois) dans un état d’euphorie personnelle indescriptible ! Exit le Président de la République qu’il faut saluer debout, devant qui il faut retirer son couvre-chef, à qui il faut parler sans s’asseoir… Exit le Président de la République qui en cinq heures d’audience parle tout seul pendant quatre heures et demie de choses et d’autres. Exit le Président de la République dont on quitte le bureau plus confus et perdu qu’on y est entré. Ça, c’est pour les questions de forme, et bien entendu, il faudra plus qu’une rencontre avec Patrice Talon pour s’en assurer définitivement.

Quant au fond, en a-t-on fini aussi avec les promesses faramineuses qu’on ne peut raisonnablement pas mettre en œuvre ? En a-t-on fini avec les mensonges et les subterfuges servis aux syndicalistes ? En a-t-on fini avec la création des syndicats dits "patriotes" confusionnistes et divisionnistes ? Qu’en sera-t-il lorsque les travailleurs organiseront éventuellement une marche de protestation ? Nous attendrons que le temps passe pour avoir réponse à toutes ces questions et à d’autres.

En attendant, l’opération de charme intitulée « Talon séduit les syndicalistes » a marché à fond. Aux dires même de ses interlocuteurs, le Chef de l’Etat se serait montré affable, attentif, voire taquin à certains moments. Il a annoncé la restauration prochaine de la Grande commission mixte paritaire de négociations Gouvernement-centrales syndicales. Il a écouté et admis les reproches qui lui ont été faits sur son style de gouvernance, sur certaines prodigalités gouvernementales, notamment en ce qui concerne la rémunération des membres de la commission des réformes politiques et institutionnelles, même s’il a cru bon devoir s’en expliquer. Il a accueilli favorablement les observations et recommandations qui lui ont été adressées dans le cadre de la rentrée scolaire à venir, la situation de crise à l’université d’Abomey-Calavi, le sort des travailleurs en général, etc.

Patrice Guillaume Athanase Talon vient encore donc de marquer un coup. De charme et de séduction. Bravo ! Mais, Paul Esse Iko, Pascal Todjinou et les autres connaissent ça. Et ils ne se laisseront pas duper encore une fois. La capacité de séduction ne fait pas toute seule la bonne gouvernance.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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23 août 2016 2 23 /08 /août /2016 07:55
Crise à l’UAC : la délicate intervention de Patrice Talon

Patrice Guillaume Athanase Talon n’interviendra pas dans la crise à l’Université d’Abomey-Calavi. Pas à la manière ostentatoire et outrancière de son prédécesseur Thomas Boni Yayi qui ne manquait aucune occasion de s’improviser conciliateur dans toutes les situations de crise possibles et imaginables à travers le pays. Après un long silence, le Chef de l’Etat a fini par le faire savoir, la situation le préoccupe et il compte bien s’en mêler, mais sans remettre en cause la prépondérance des autorités rectorales. Reste à savoir comment il va bien pouvoir s’y prendre, vu que le Professeur Brice Augustin Sinsin, recteur de l’UAC avait déjà laissé entendre qu’aucune intervention, quelle qu’elle soit, ne le ferait revenir sur les décisions déjà prises et annoncées.

Cela fait maintenant plusieurs mois que le campus universitaire d’Abomey-Calavi est dans une situation de crise, due à la situation à la Faculté des Lettres, Arts et Sciences humaines (FLASH) exacerbée ces dernières semaines par l’invalidation de l’année académique 2015-2016 et l’exclusion d’une vingtaine d’étudiants pour je cite « indiscipline et violence ». En cause, le refus des autorités décanales d’organiser à l’instar d’autres entités universitaires, des examens de rattrapage au profit des étudiants n’ayant pu obtenir la moyenne de validation des unités d’enseignement au cours de la première session d’évaluation. Les étudiants accusant les enseignants, de violer par ce fait les dispositions réglementant le système d’enseignement LMD, et les enseignants arguant être dans la plus totale légalité. Passée l’étape de la résistance dite « contraire à toute forme de violence », après la manifestation réprimée du 26 juillet 2016, est survenue récemment l’épisode de la guerre nauséabonde qui aura consisté à déverser des substances malodorantes dans les amphithéâtres et salles de composition d’une autre Faculté afin d’en paralyser le déroulement des évaluations. Avec à la clé l’arrestation d’un responsable étudiant.

Dans ces circonstances bien sûr, l’intervention d’un médiateur était devenue indispensable. A un tel point que l’Assemblée nationale à travers son Président et la Commission en charge de l’éducation, a choisi d’entendre les parties au différend en cours. Pour apporter sa part à la résolution du conflit. En même temps que les responsables des Centrales syndicales, reçus au Palais de la Marina par le Chef de l’Etat, n’ont pas manqué de lui faire part de leurs préoccupations sur le sujet. Mais il semblerait bien que l’intervention de Patrice Talon dans cette crise soit de l’ordre du laborieux, du complexe. En effet, dans le strict respect de l’indépendance des autorités rectorales, le Président de la République a fait savoir qu’il n’entendait pas remettre en cause de manière ostentatoire les décisions déjà prises par ces dernières. « De manière ostentatoire », tout est dit. Ce sont bien ces décisions qui constituent le nœud gordien à trancher afin de trouver une solution à la crise. Patrice Talon ne va pas s’y prendre à la méthode Yayi : Grande réunion des protagonistes, de préférence à la salle du Peuple de la présidence de la République, remise en cause générale des décisions et options responsables de la crise de part et d’autre, annonce de la « fin » de la crise et de consultations futures, applaudissements à tout rompre. J’exagère à peine. Cela avait au moins une vertu : d’apporter la solution immédiate. Mais, dans le cas de l’université notamment, on s’en rend bien compte, ce n’était qu’une solution éphémère. Avec Patrice Talon, c’est donc ce côté ostentatoire qui devrait disparaitre, va savoir pour quel résultat qui ne remettrait pas en cause l’autorité rectorale.

Le temps est arrivé pour le « certain génie » dont se réclame Patrice Guillaume Athanase Talon de faire une première démonstration de ses talents. Et celle-là, de manière ostentatoire, de préférence.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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22 août 2016 1 22 /08 /août /2016 12:26
Quand Boni Yayi vampirise encore l’actualité nationale

On ne parle encore que trop de lui. Quatre mois après son départ du pouvoir, il est vrai qu’il était inévitable que Thomas Boni Yayi, au regard de la gouvernance atypique qu’il a instaurée à la tête du Bénin en dix longues années, ne pouvait que faire pendant un certain temps l’objet de régulières comparaisons avec son successeur. Avec d’un côté les nostalgiques de son époque, qui n’auraient de cesse de rechercher en Patrice Talon certaines des qualités de leur champion déchu, et de l’autre côté, les « rupturiens » qui gloseraient à longueur de temps sur les différences de style, de compétence, de tempérance, d’approches entre le nouveau et l’ancien Président. Le nom de Boni Yayi, c’est donc normal, devait encore rester dans l’actualité au Bénin un certain temps. Le nom, et pas le personnage. Car l’ampleur de la présence de l’ancien Président de la République dans l’actualité béninoise ces derniers temps me parait pour le moins démesurée. La faute à tous ceux qui accordent à ses gesticulations plus d’attention qu’elles n’en méritent.

Boni Yayi devrait être aux anges ces derniers jours ou presque. L’homme aime bien captiver l’attention du public ; nous avons eu dix interminables années de propagandisme acharné pour nous en rendre compte. Et donc s’il parvient encore à faire parler de lui dans la plupart des journaux, et sur de nombreuses chaines de radio et de télévision, il doit en être plus ou moins enchanté. Sauf que les propos tenus sur sa personne sont sans doute trop contradictoires, pour ne que lui faire plaisir. Mais cela n’a aucune importance.

Il faut simplement remarquer que l’on ne parle que de lui depuis sa fameuse visite sur le chantier de l’aéroport de Tourou à quelques kilomètres de Parakou, au cœur du septentrion béninois. Une visite inopportune dont la presse s’est fait l’écho, en lui attribuant au passage des propos abjects relayés à travers les réseaux sociaux et rapidement contestés par d’autres organes de presse. Dans certains de ces journaux proprement myopes ou volontairement aveugles, c’est la visite même de Boni Yayi à l’aéroport qui a été contestée. Avant que Ministres, Députés, Préfet, personnalités politiques, citoyens ordinaires ne se mêlent d’en parler, pour amplifier la polémique.

Interdiction de récidive par-ci, de la part du Ministre des travaux publics et des transports, menace de mise au pas par-là de la part du Préfet du Littoral en cas de pareille attitude dans « sa juridiction » territoriale, diatribes anti Yayi de la part du député Rachidi Gbadamassi à l’opposé de la posture de défense adoptée par un autre parlementaire Benoit Degla… J’ai même cru lire un post dont l’auteur estime que les agissements de Boni Yayi procèdent d’une stratégie de diversion dont l’objectif serait de pousser le Président Patrice Talon à se « débarrasser de lui » en l’envoyant s’occuper au nom du Bénin, des affaires d’une institution internationale. En somme une retraite dorée à l’abri des poursuites possibles pour d’éventuelles irrégularités commises dans l’exercice de ses deux mandats consécutifs. Sous prétexte de volonté de maintien de la paix au Bénin. Ce serait quand même trop facile qu’un ancien Chef d’Etat se lance consciemment dans des agissements attentatoires à l’ordre public et que, plutôt que de le traiter comme le citoyen lambda qu’il est redevenu, on lui offre l’intouchabilité dont il rêve et qu’il n’a pas su travailler à s’octroyer lui-même par une gouvernance politique saine.

A donner plus d’importance aux agitations, je dirais même aux manœuvres de Boni Yayi, c’est à de pareilles conclusions et propositions que l’on finit par aboutir. Assez de parler d’un ancien Chef d’Etat, forclos qui a du mal à se faire à sa nouvelle condition ! A Patrice Guillaume Athanase Talon, de sortir de sa sobriété médiatique systématique que ses collaborateurs appellent la «normo-communication» pour occuper un terrain très largement déblayé par son prédécesseur. Sans cela, on n’a pas fini de gloser sur les incartades même les plus infimes de l’ancien Président de la République.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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19 août 2016 5 19 /08 /août /2016 10:01
La sournoise tentative d’opposer Talon à Dossou-Aworet

Les émissaires de la désinformation sont toujours à l’œuvre contre le magnat africain du pétrole Samuel Dossou-Aworet. Quelques jours après les publications tendant à le rendre seul responsable de l’état de blocage du projet de réhabilitation, d’extension et d’exploitation de la voie ferrée Cotonou-Niamey, les voilà de retour, dans un nouvel article mis en ligne sur le site d’un organe peu connu Info du continent avec pour objectif inavoué de semer le trouble dans les relations entre l’opérateur économique et le Chef de l’Etat béninois Patrice Guillaume Athanase Talon. Intitulé cette fois « L’opérateur économique Samuel Dossou-Aworet grince les dents », l’article tente de faire accréditer la thèse que le Président du Groupe PETROLIN, ne fait pas assez confiance au Président de la République de son pays pour trouver une solution adéquate au différend en cours. A l’appui de cette réflexion, la chronique que j’ai pour ma part publiée il y a quelques jours pour fustiger les allégations mensongères contenues dans les précédents articles.

Ainsi, sous prétexte que EDEN TV appartient à Monsieur Samuel Dossou-Aworet, c’est la parole de votre humble serviteur que le rédacteur du nouvel article cherche à faire passer pour le sentiment et la réplique de celui-ci. Encore une fois donc, les sbires de celui qui commandite ces articles se trompent de cible, si ce n’est qu’ils font exprès comme ils en ont l’habitude, pour induire leurs lecteurs en erreur. En réalité, les propos tenus dans ma chronique ou plus globalement sur EDEN TV à ce sujet ne peuvent et ne doivent en aucune manière être attribués à autrui. De plus, s’il a été dit qu’il s’agissait d’une tentative de discréditer le groupe PETROLIN, à aucun moment la chronique n’affirme que le Président Talon pourrait se laisser distraire, bien au contraire. Il est de notoriété publique que le président béninois a pris le parti du droit et de la justice dans cette affaire, toutes choses qui sont en faveur de M. Dossou-Aworet. De plus, ce dernier n’a jamais réprouvé à ma connaissance les démarches du Président Talon en vue de trouver une solution au différend qui soit conforme au droit et à l’intérêt supérieur de la nation.

Essayer de faire croire que la réaction du journaliste que je suis, employé ou non des médias de M. Dossou-Aworet, représente la parole de ce dernier et de surcroit le signe qu’il doute de la finalité de l’action de médiation entreprise par le Président Patrice Talon auprès de toutes les parties au dossier, c’est une affabulation de plus. Du même genre et de la même origine que toutes celles qui ont fusé par organes de presse interposés depuis que cette affaire est en cours. Je l’ai dit et je me vois obligé de le répéter, Patrice Talon n’est certainement pas homme à se laisser distraire par ces manœuvres d’un autre temps. Et les exécutants des « opérations commando » qui sont dans l’ombre de ces publications devraient se rendre à l’évidence que le groupe PETROLIN, parce qu’il est adjudicataire du projet depuis 2010, parce qu’il a fait démonstration de sa bonne foi sur toute la ligne et parce qu’il est dirigé par un Béninois, ne peut plus être écarté du projet, en tout cas pas tant que le Bénin sera dirigé comme c’est le cas à l’heure actuelle par un Chef d’Etat qui affirme et démontre son patriotisme. Plutôt que de tenter tout aussi sournoisement que vainement d’éliminer un adversaire qui n’en est pas, ils devraient songer à faire des concessions si l’intérêt supérieur du Bénin et des Béninois leur importait vraiment. Mais j’oubliais, ces gens-là ne sont pas des Béninois, je ne devrais pas rêver.

C’est mon opinion, et je la partage. En attendant le prochain coup-bas.

James-William GBAGUIDI

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18 août 2016 4 18 /08 /août /2016 09:10
Justice béninoise : le toujours teigneux Michel Adjaka

Dix ans de résistance au pouvoir politique, et ils en redemandent. Ils, ce sont les magistrats du Bénin, robes noires, caractère trempé, esprit vif et à en juger par leurs récentes prises de position, l’insurrection dans l’âme. On les a vus, parfois seuls au front, démontrer à Thomas Boni Yayi et à son régime déviant à l’époque, que la caporalisation de la société à laquelle il tenait plus que tout, devait s’arrêter aux portes de la magistrature. On les a vus en grève. Très très souvent. On les a vus manifester. Plus rarement. Mais jamais on ne les as vus plier, si ce n’est cette frange instrumentalisée transformée un moment en syndicat « patriote » puis rapidement réduite à l’inaction faute de crédibilité. Certains s’imaginaient donc les voir embrasser la rupture sans ciller et s’acoquiner avec. Mais c’était compter sans l’irréductible syndicat qu’est l’Union nationale des Magistrats du Bénin (l’UNAMAB) avec à sa tête un intraitable Michel Adjaka.

48 heures, voire plus, après le redéploiement sur toute l’étendue du territoire national de près des 2/3 des magistrats béninois, l’absence de réaction de l’UNAMAB et de son président, commençait à me laisser penser que Me Joseph Djogbénou, Ministre de la Justice, et le Conseil supérieur de la Magistrature (CSM) avaient réussi un coup de maitre. Procéder à un si vaste redéploiement sans susciter de commentaires séditieux de la part du célèbre syndicat, aurait en effet relevé de l’exploit. En dix ans de gestion du régime précédent, aucune mutation ou presque, n’a jamais obtenu l’avis favorable du syndicat des hommes en toge noire.

Mais il n’aura pas fallu attendre bien longtemps, Michel Adjaka a parlé. Il dénonce, au grand dam de Me Djogbénou, des nominations « illégales, opaques et peu rationnelles du personnel magistrat ». Ainsi, la charge est sonnée. Si le régime du Nouveau Départ pensait pouvoir bénéficier de l’œil conciliant de l’UNAMAB dans le cadre de sa gouvernance, c’est raté. Après les premières récriminations des Magistrats peu après l’avènement de la rupture à laquelle il est indéniable qu’ils ont contribué, récriminations ayant trait au respect des décisions de justice dans le cadre de la crise du football, les voici désormais dans des réprobations corporatistes. Sauf que Michel Adjaka, dans son post sur facebook à travers lequel il dénonce les incohérences de la décision de redéploiement des Magistrats, ne dit pas si ceux-ci vont laisser passer la pilule sans autre forme de procès ou s’ils vont se mettre en tête de faire revenir l’exécutif sur les incongruités qu’il dit avoir relevées. Ce qui équivaudrait sans doute au déclenchement d’un mouvement de protestation, un de plus dans le secteur de la justice.

De toute évidence, la lutte que les Magistrats béninois ont menée contre les tentatives de mise au pas orchestrées par le régime Yayi entre 2006 et 2016 n’était pas une guerre de personnes. Les Magistrats béninois tiennent à leur indépendance individuelle et collective, autant qu’au respect des décisions de justice qu’ils rendent. Me Joseph Djogbénou, avocat de profession et donc amené à collaborer avec eux de manière régulière depuis bien des années, ne devrait donc pas être surpris de leur réaction. L’amphitryon gouvernemental, ainsi que je le caricaturais il y a peu dans une autre chronique est bel et bien sur le gril. Et voici le tour de l’irréductible Michel Adjaka d’alimenter le bûcher.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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17 août 2016 3 17 /08 /août /2016 10:57
Bénin : Lutte estudiantine version nauséabonde

L’université béninoise et le campus d’Abomey-Calavi en particulier, vont devenir célèbres si ce n’est déjà fait. Le monde entier, interconnecté par les réseaux sociaux a en effet découvert avec stupéfaction dans la matinée du mardi 16 aout 2016, la nouvelle méthode de lutte adoptée par les étudiants pour protester contre les politiques discriminatoires et injustes dont ils estiment être les victimes, notamment au niveau de la Faculté des lettres, Arts et Sciences humaines (FLASH) où, non content de les priver des compositions de rattrapage qu’ils réclament depuis bien longtemps, les autorités décanales et rectorales viennent d’exclure 21 de leurs compagnons. Et la méthode est pour le moins singulière. Tenez-vous bien, accrochez votre estomac et éloignez-vous de vos plats un instant : il s’agit de chiottes humaines. Des quantités de matières fécales, oui, mélangées à de l’huile de vidange usagée et déversées dans les salles où devaient se tenir les compositions de fin d’année pour les étudiants d’une autre entité universitaire, la Faculté des Sciences et Techniques (FAST), étant rappelé que l’année académique 2016 a déjà été invalidée à la FLASH.

Drôle de manières de revendiquer des droits. Avec ça, le Bénin devrait entrer dans le Guinness record des insolites sans tarder. La puissance et l’universalité des réseaux sociaux a en tout cas déjà porté la purulente nouvelle bien au-delà des frontières de notre petit Etat. Et certains organes de presse étrangers tentent déjà de comprendre les tenants et aboutissants d’une telle pratique, d’une idée aussi saugrenue.

Mais, passée la surprise, passés les pincements de nez et les regards détournés, passés les coups d’éponge et les grands jets d’eau, passés les aspersions de javel et les pulvérisations de désodorisants, il ne faudra pas laisser à la presse (nationale et internationale) seule le soin de s’interroger sur ces événements, et déterminer comment les éviter à l’avenir. Car il faut bien croire que les étudiants ayant recouru à ces méthodes fétides, en ont d’autres qu’ils attendent de mettre en œuvre, tant que leurs revendications ne sont pas satisfaites d’une manière ou d’une autre. C’est pour cette raison qu’il revient aux autorités rectorales de prendre leurs responsabilités.

Il y a quelques semaines, quelques mois, quelques années, j’avais la ferme conviction que les forces de police et de gendarmerie n’avaient strictement rien à faire sur un campus universitaire, et celui d’Abomey-Calavi ne fait pas exception à la règle. Avec le temps, mes convictions s’émoussent. Surtout quand j’observe les techniques de lutte estudiantines de plus en plus antinomiques des libertés collectives. En effet, en se levant et en quittant leurs domiciles et autres résidences ce matin du 16 aout, la majorité des étudiants des entités universitaires où étaient programmés les examens finaux, ne s’attendaient pas à croiser non pas les examinateurs, enseignants et surveillants, mais des matières fécales ! De même, quelques mois plus tôt, ceux qui ont été débarqués sans ménagement des salles de composition ou de cours par leurs camarades étudiants grévistes avaient probablement plus que ces derniers l’intention de se soumettre aux activités académiques réglementaires et ainsi valider leur année dans les meilleurs délais et conditions.

Dans ces circonstances, les franchises universitaires qui ne sont qu’une lointaine réminiscence de la toute-puissance de l’église par rapport à l’Etat, à l’époque médiévale où les universités étaient presque toutes religieuses, ne peuvent plus s’appliquer de façon aveugle ou partielle. Si les autorités rectorales veulent les remettre en cause comme cela semble être le cas avec la présence des forces de l’ordre aux entrées principales en certains points stratégiques du campus, il y a lieu de faire participer ces dernières au maintien de l’ordre et de la sécurité des étudiants sur le campus. En empêchant rigoureusement que les étudiants désireux de poursuivre en toute quiétude leur formation soient empêchés de le faire par les trublions et les agitateurs en grève perpétuelle.

Mais tout de même, la meilleure méthode pour calmer les tensions et ramener l’ordre, c’est le dialogue. Sans fioritures et sans pincements de nez.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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16 août 2016 2 16 /08 /août /2016 10:55
Chemins de fer Bénin-Niger : campagne de désinformation contre Samuel Dossou Aworet

La crise des chemins de fers qui touche le Niger et le Bénin sous la forme d’un bras de fer entre les opérateurs économiques Samuel Dossou Aworet du Bénin, Président du groupe PETROLIN et le français Vincent Bolloré Président de Bolloré Africa Logistics, est-elle vraiment en passe de connaitre l’aboutissement heureux annoncé il y a peu par le Président Patrice Talon ? A en juger par la campagne d’intoxication sournoise engagée contre l’opérateur économique béninois, il y a lieu de s’interroger. Depuis quelques jours en effet, circule sur internet et les réseaux sociaux un article dont les allégations laissent deviner que, tapis dans l’ombre, l’un ou quelques-uns des protagonistes de cette affaire ne souhaite(nt) pas en voir l’issue qui se dessine. Allez savoir le(s)quel(s).

Intitulé « Dans la gare de Cotonou, les rails s'oxydent et le chemin de fer béninois reste à quai », l’article, diffusé par l’Agence France Presse et plusieurs autres organes de presse partenaires, prétend revenir sur les tenants et aboutissants de la situation indexée dans son intitulé, en se désolant bien sûr de la paralysie dans laquelle se retrouve le projet de réhabilitation et d’extension du corridor ferroviaire Cotonou-Niamey et par voie de conséquence la société d’exploitation, ses ouvriers et son matériel. Ainsi, dans son allure générale, l’article donne l’impression que le responsable du blocage en cours n’est autre que Samuel Dossou Aworet et que Vincent Bolloré par contre, avait apporté par son implication dans le projet, le salut que tous les autres acteurs attendaient. En somme, d’un côté le diable et de l’autre le bon Dieu. Sauf qu’à la vérité, les rôles ne sont pas tenus de manière identique.

La réhabilitation des chemins de fers de Cotonou à Parakou et leur extension jusqu’à Niamey est un rêve que caressent les Etats du Bénin et du Niger depuis plusieurs décennies. La vérité est que, quand le groupe PETROLIN de Samuel Dossou Aworet a obtenu suite à un appel d’offres international, l’adjudication dudit projet en juillet 2010, l’espoir était grand que l’Organisation commune Bénin-Niger (OCBN), déjà au bord de l’asphyxie, sorte de sa léthargie. Seulement, en dépit des investissements consentis dans le cadre des études de faisabilité, le gouvernement n’a à aucun moment cru bon devoir signer au profit de l’adjudicataire, la convention devant lui permettre de lancer l’exécution du projet. C’est ainsi que de reports en reports, de promesses non tenues en promesses non tenues, apparait en 2013 le groupe Bolloré, introduit par les deux Etats dans le projet en qualité « d’opérateur stratégique », devant collaborer avec l’adjudicataire et les Etats pour mener à bien le projet. Mais c’est véritablement là que les choses vont se gâter. Et pour plusieurs raisons. Vincent Bolloré décide de s’accaparer du projet à la façon « opération commando » dont il se revendique et convainc les Chefs d’Etat du Bénin et du Niger de lui en signer la convention en aout 2015. Mais le projet qu’il porte n’a plus grand-chose à voir avec celui que proposait le groupe PETROLIN. Plus question de réaliser des voies ferrées au format standard désormais en vogue dans le monde entier. Bolloré ramène au Bénin de vieux rails européens datant de l’époque de la Première Guerre mondiale, ceux-là même qu’il a installé au Niger avec pour conséquence plusieurs déraillements, et entame contre l’avis de tous les experts qu’ils soient gouvernementaux ou non, la "réhabilitation" de la voie ferrée. C’est contre ces méthodes usurpatrices que s’est prononcée la justice béninoise en novembre 2015, quand il a conclu à l’illégalité de tous les agissements de l’Etat béninois et du groupe Bolloré dans ce dossier et ordonné la fin des travaux entrepris dans ce cadre sur le site de l’OCBN et sur toutes les composantes du projet « Epine dorsale ». Et donc, si 500 km de rails prétendument neufs s’oxydent au soleil dans la gare de Cotonou, attendant d'être posés, la faute, s’il y en a une, n’incombe certainement pas à Samuel Dossou, mais bien à Thomas Boni Yayi, alors président de la République du Bénin et à son gouvernement.

Les rédacteurs de l’article de l’AFP, quand ils évoquent la supposée incapacité du groupe PETROLIN à réunir les financements nécessaires au projet, n’en apportent aucune preuve. De même, ils ne mentionnent pas que dans le dossier de reprise de l’OCBN présenté par Samuel Dossou Aworet, le volet social, notamment la reprise du personnel ainsi que le versement intégral des arriérés salariaux est pris en compte. Autant qu’ils oublient de mentionner que sans la signature de la convention, dans les règles de l’art, aucun investisseur n’aurait été assez fou pour s’aventurer dans les investissements jusque-là consentis.

L’article de l’AFP m’a l’air bien suspect. Si les rédacteurs évoquent le refus des acteurs de se prêter aux interviews pour justifier les contre-vérités distillées, il n’était pourtant pas compliqué d’obtenir les informations véridiques ayant fait l’objet de plusieurs articles de presse les années antérieures. Une main invisible me semble cachée derrière. Un commanditaire. Mais le Président Talon qui promet une sortie de crise heureuse sous peu ne devrait pas se laisser distraire, pas plus que l’opinion publique à qui le journaliste professionnel doit la vérité, et rien que la vérité.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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10 août 2016 3 10 /08 /août /2016 13:44
Joseph Djogbénou : un amphitryon sur le gril

C’est, comme qui dirait, le plus actif des chantres du Nouveau départ. Un porte-parole ou même une icône. Le Ministre de la justice, de la législation et des droits de l’homme depuis sa nomination, incarne presque à lui seul les qualités revendiquées du nouveau régime : élégance, éloquence, ponctualité, sobriété, rigueur et j’en passe. C’est peut-être pour toutes ces raisons que le Chef de l’Etat, Patrice Guillaume Athanase Talon, a décidé de l’appeler très tôt à ses côtés pour bénéficier de ses atouts et en faire bénéficier le gouvernement. Mais tout sémillant soit-il, Maitre Joseph Djogbénou est vraisemblablement arrivé à ce moment où tous les dirigeants commencent à perdre de leur lustre. Le motif ici, la grève d’une partie de ses administrés qui, s’il n’y prend garde, pourrait déteindre sur le reste de l’administration publique et altérer sa propre image.

Cela fait déjà quelques années que les travailleurs du secteur de la justice autres que les Magistrats, rongent leur frein. Aux côtés de fonctionnaires parmi les mieux traités du pays, ils éprouvent le sentiment d’être des agents de seconde zone. Bons à assister les hommes en toges dans la quasi-totalité des fonctions de ces derniers, mais avec des niveaux de rémunération qui n’ont rien, mais absolument rien de commun. Réunis au sein du Syndicat national des Travailleurs de la Justice (SYNTRA-Justice), ils dénoncent donc des conditions de vie et de travail qu’ils jugent déplorables et surtout la politique de deux poids deux mesures qui se traduit par l’existence d’un statut particulier au sein de la fonction publique pour le corps des Magistrats, mais pas pour leurs collaborateurs les plus immédiats. C’est ainsi que, pour fouetter et faire réagir les nouvelles autorités, un mouvement de grève de 48h a été déclenché et diversement observé les 3 et 4 août dernier. Mouvement passé à 72h depuis hier 9 août et susceptible de tacite reconduction jusqu’à satisfaction des revendications syndicales.

Et c’est ici que la superbe de Me Joseph Djogbénou, Ministre de tutelle, en vient à risquer d’être écornée. Il est accusé ni plus ni moins, de traiter le personnel de son Ministère, à l’exclusion des Magistrats comme je cite « ses étudiants d’amphi ». Ce qui pourrait signifier qu’il les prend de haut ou qu’il pense pouvoir tout leur apprendre. Alors que, pris dans le tourment de l’un des premiers mouvements de débrayage de l’ère du Nouveau départ, il était attendu du Professeur Djogbénou, naguère encore opposant et ardent défenseur des droits et des revendications sociales, plus d’écoute, de diplomatie et d’esprit de concession que ce que laissent entendre de lui ses administrés en courroux.

Dans les autres secteurs de l’administration où couve la fronde sociale, l’attitude de Joseph Djogbénou, sa préhension de la grève dans son propre ministère sont pourtant observées avec attention ainsi que me l’ont confié deux syndicalistes des Ministères de la santé et de l’Intérieur. Un peu comme si le règlement de la crise au Ministère de la justice pourrait être le signe de la disponibilité et de l’ouverture du nouveau régime à se saisir des problèmes syndicaux et y apporter des réponses concrètes.

Voici donc la redoutable épreuve de l’exercice des responsabilités politico-administratives. Tant qu’il était un des chantres de l’opposition face à Thomas Boni Yayi et à son système, la critique était aisée. Aisée et même, venant d’un rhétoricien de la trempe de Me Djogbénou, gracieuse. Mais « aller au charbon » a cela de particulier qu’il oblige à se salir. Après le charme de l’état de grâce, voici le cambouis. Et je crois savoir que même s’il transparaît pour l’instant une forme d’atermoiement dans sa posture, le Garde des Sceaux ne va pas chercher à se soustraire à ses responsabilités.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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8 août 2016 1 08 /08 /août /2016 10:22
Ajavon-Talon : de la lune de miel au soleil de fiel ?

Les mauvaises langues auront-elles donc raison d’avoir prédit que le tandem Talon-Ajavon ferait long feu ? Que l’entente cordiale entre le nouveau Président de la République et celui qui, au second tour de la présidentielle de mars 2016 lui a apporté un soutien décisif, tomberait en désuétude ? Des signes de frustration aux manifestations voilées de désamour, il semblerait bien que ce soient les plus pessimistes qui soient en passe d’avoir raison. Ce ne sont en tout cas pas les causes possibles de mésentente, qu’elles soient anciennes ou récentes qui manquent.

Les deux opérateurs économiques les plus fortunés et les plus puissants du Bénin, n’avaient parait-il, pas vraiment d’atomes crochus par le passé. Pas d’effusions d’estime, pas d’épanchements de bons procédés… Mais tant qu’ils opéraient dans des domaines diamétralement distincts, production, égrenage et exportation du coton pour l’un ; importation et réexportation de produits congelés pour l’autre, il n’y avait aucune raison pour que s’affrontent les deux mastodontes. Jusqu’en 2012 où peu après le début de son second mandat, Boni Yayi, alors Président de la République, a introduit le Programme de Vérification des Importations (PVI) dit de nouvelle génération, confié aux bons soins du magnat du coton, chargé dès lors d’une partie des opérations douanières, touchant de fait aux intérêts du Groupe CAJAF-COMON du champion national du poisson et de la volaille d’importation, Sébastien Germain Ajavon. La discorde qui en découla entre les deux hommes fut de courte durée. C’est-à-dire jusqu’à ce que Boni Yayi décide 10 mois plus tard de délester Patrice Talon de son nouveau gagne-blé ; mais elle fut suffisamment grave pour engendrer entre les deux opérateurs économiques une certaine animosité. Animosité que le Chef de l’Etat d’alors, devenu l’ennemi commun par le fait de son acharnement contre tous, allait encore contribuer à atténuer. Jusqu’au déclenchement du combat pour la succession. Combat remporté au final par Patrice Talon avec la contribution de Sébastien Germain Ajavon dans les conditions que chacun sait.

Trois mois après la présidentielle qui aura permis de dégager Thomas Boni Yayi et son système, les relents de brouille entre les deux alliés qui ne cessent de se propager dans l’opinion et dans la presse ont diverses origines. Plus ou moins justifiées. D’abord la formation du gouvernement et ses corollaires. Les partisans de Sébastien Ajavon, dont beaucoup essaient de retrouver leur autonomie, s’estiment lésés de n’avoir pas été appelés en masse au gouvernement. Et reprochant même à leur leader de ne pas se montrer assez exigeant dans la redistribution des autres postes politiques. Un autre motif pourrait être la réconciliation rapide Houngbédji-Talon. Trop rapide pour de nombreux observateurs, et signe que Patrice Talon ne souhaite probablement pas voir émerger dans la région de l’Ouémé et du Plateau un fief politique pour son puissant allié opérateur économique.

A cela, il faut ajouter la menace à peine voilée du Chef de l’Etat, à l’occasion de la discussion « à cœur ouvert » du 1er août dernier à la télévision nationale, de s’attaquer au tout-puissant empire de son partenaire de coalition pour l’obliger à respecter les règles de la concurrence et la promotion de la production locale de volaille que parait-il, ses activités menacent d’extinction. Le langage était certes très feutré, très diplomatique, mais la menace était claire.

Il faut noter que la patience dont fait preuve Sébastien Ajavon jusque-là est remarquable. Mais quand arrivera l’heure du soleil de fiel, par opposition à la lune de miel qui s’en va s’étiolant, les Béninois risquent de regretter la rocambolesque rivalité Talon-Yayi qui a provoqué en même temps que les grincements de dents y associés, beaucoup de risées, tant certains épisodes étaient rocambolesques. Nul ne saurait prédire ce qui, en ce moment-là, pourrait survenir, mais il est aisé de penser à l’avance que ce ne sera pas une banale rivalité.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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5 août 2016 5 05 /08 /août /2016 08:19
Leçons de grammaire pour responsables étudiants en colère

Péril en la demeure universitaire béninoise ! De l’invalidation de l’année académique 2015-2016 à la Faculté des lettres, arts, et sciences humaines (FLASH), on va peut-être bientôt aboutir à celle de l’année pour toutes les facultés et écoles attachées à l’Université d’Abomey-Calavi. Des échauffourées auraient d’ailleurs déjà atteint l’Ecole nationale d’Economie appliquée et de Management (ENEAM) à plus de vingt kilomètres du campus d’Abomey-Calavi cette semaine. En cause, la décision des autorités rectorales, au-delà de l’invalidation de l’année académique en cours, de radier une vingtaine de responsables et leaders étudiants à la FLASH pour cause d’actes d’indiscipline. Et ces derniers de réagir, menaçant à mots à peine couverts, de semer le trouble à l’université si la décision n’est pas rapportée dans « les plus brefs délais ».

Dans ces circonstances, je devrais peut-être m’interroger sur les tenants et aboutissants de cette crise, l’objectivité ou non de la lutte estudiantine, la pertinence des décisions rectorales, etc. Mais non. Ce qui retient aujourd’hui mon attention est ailleurs et aussi incroyable que cela puisse paraitre, est constitutif d’un des ferments de la crise : il s’agit tout bêtement de la forme, de la qualité du langage des étudiants. Elle est tout simplement désastreuse. En terme de style, de grammaire, de conjugaison, d’orthographe…

Explications. Suite à l’annonce de la radiation de leurs camarades par décision rectorale, les responsables des trois mouvements syndicaux étudiants (FNEB-UNEB-UNSEB) se sont réunis pour adresser une correspondance commune au Doyen de la FLASH. Celle-ci, dans sa forme au moins, est symptomatique des tares langagières évoqués plus haut. Morceaux choisis :

  1. La correspondance portant en objet, « plainte contre la décision rectorale N°… portant sanctions disciplinaires infligées à des étudiants de la FLASH » est adressée au Doyen d’une faculté pour protester contre une décision rectorale. Anachronisme. Les étudiants espèrent-ils que le Doyen rapporte la décision du Recteur ? Il y a là une incohérence dans leur connaissance de la hiérarchie des normes.
  2. Ils disent venir « notifier » au Doyen la décision de sanction prise par le recteur. Le mot est mal choisi. A moins que la décision ait été prise par le recteur en l’absence des responsables pédagogiques de la FLASH. Ce qui n’est pas le cas, puisque à en croire la même correspondance, ces sanctions ont été décidées en Conseil pédagogique de la FLASH érigé en Conseil de discipline et proposées à l’approbation du recteur.
  3. Ils commencent le paragraphe d’après par « En effet », alors même qu’il ne s’agit pas d’une déduction, mais d’un rappel. Rappel du fait que les étudiants sanctionnés sont des responsables « accrédités » par leurs camarades « pour les représenter et à les défendre partout où besoin se fera sentir ». Ici, non seulement le terme « accrédités » est quelque peu inapproprié, mais en plus, la phrase est incorrecte en son format global.
  4. Ils écrivent plus loin, après quelques autres incorrections langagières « … puisse que… » en deux mots ; « … nous avions orientés le mouvement étudiant » en ajoutant un S final à « orienté », mais en privant de ce même S final le mot « contraire » dans l’expression « des mouvements contraire à toute forme de violence ».
  5. Ils fustigent (sans doute à raison) le fait de n’avoir pas été écoutés avant la décision de sanction et ajoutent « …nous en voudrions pour preuve que même l’article 17 alinéa 1 de la constitution béninoise du 11 décembre 1990 dispose que toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente ». Mais la preuve du fait de n’avoir pas été écoutés ne peut pas être un texte de loi, fut-il une disposition constitutionnelle ! en l’espèce, ils auraient pu évoquer le procès-verbal du Conseil de discipline qui ne mentionnerait alors nulle part leur présence ni leurs arguments de défense.
  6. Et ils finissent, allons dans le fond, avec des menaces très claires à l’encontre des autorités et de la quiétude universitaire en général, non sans avoir ajouté de nouvelles expressions grossières du genre « …fameuse décision » ou encore parlant des autorités universitaires, « des déconvenues qui découleraient de leurs entêtements à ne pas satisfaire nos revendications ».
  7. La cerise sur le gâteau, ce sont les ampliations. Notamment celle adressée au Recteur « ATCR », ce qui signifie « à titre de compte-rendu ». Comme si la correspondance adressée au Doyen de la FLASH avait été initiée par le Professeur Brice Sissin en personne.

Pour des responsables étudiants, qui plus est inscrits en Faculté des lettres, arts, et sciences humaines, cela est pour le moins dramatique. Un tel niveau d’ignorance des règles minimales de la langue française et de la rédaction administrative ! Si pertinente que puisse être la cause, en de pareilles circonstances, il ne faut pas s’étonner que ceux qui la défendent, n’inspirent pas le respect qui normalement leur est dû.

C’est mon opinion, et je la partage.

James-William GBAGUIDI

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